Cuba : l’imagination dans la rue

La grande île caraïbe, qui s’ouvre de plus en plus au tourisme, cultive ses trésors « vintage » sans délaisser les slogans révolutionnaires. Situations décalées et visions insolites vous montent bientôt à la tête, autant que le mojito.

Dilemme initial : quel transport emprunter pour découvrir La Havane ? Il n’y a que l’embarras du choix. J’avoue un faible pour les « coco-taxis ». Non, pas les véhicules aux vitres teintées du Comité central, mais ces scooters à trois roues où l’on se love dans un habitacle en forme de noix de coco. Mais les belles américaines des années 50 – Buick, Cadillac et autres Chevrolet – ont retrouvé du peps, grâce à des bricoleurs de génie qui, faisant fi de l’embargo américain, ont improvisé les pièces de rechange. Justement, les jardins d’un lieu culte de la ville, l’hôtel Nacional, servent aujourd’hui de salle d’exposition. Les antiquités aux carrosseries rutilantes trônent en majesté, tout à côté du bar fréquenté hier par Compay Segundo, et bien avant lui par des capos de la mafia américaine, Meyer Lansky et Lucky Luciano. Plus tard, à Camaguëy, nous hésiterons entre charrettes à cheval et vélos-taxis.

En attendant, balade dans la vieja Habana. Elle a fière allure, suite aux persévérants travaux de restauration autour de la cathédrale San Cristobal. Cependant, un peu à l’écart s’alignent des maisons décrépites qui menacent ruine, rehaussées de dynamiques mots d’ordre : « Hasta la victoria, siempre ». Chaleur aidant, il faut s’imbiber. Pauses obligées dédiées à Hemingway, à la Bodeguita del medio le temps d’un mojito, puis au bar Floridita, temple du daïquiri. Sans négliger un pèlerinage au musée du rhum, car à Cuba tous les chemins mènent au rhum.

Excursions dans l’arrière pays. Au nord-est, à Remedios, tandis que les pétards saluent les hôtes étrangers, le bazar « La Ilusion » – ça ne s’invente pas – propose du savon en vrac, mais pas de fournitures scolaires « Les livraisons sont en retard », déplore la vendeuse.  À Trinidad, charmante cité coloniale, des maisons aux façades ouvragées encadrent les rues pavées. Un flamboyant en fleur met en valeur l’église Saint-François d’Assise. Surprise, elle a été transformée en musée de dénonciation des agissements contre-révolutionnaires. Non loin, on sacrifie un poulet dans la rue pour le repas du dimanche, tandis que le bar Yesterday, ouvert récemment programme les vieux succès des Beatles.

Plus à l’est, la ville de Camaguëy fête les 500 ans de sa fondation. Mais le long de la grande artère piétonnière, des cuentapropistas (auto-entrepreneurs) ont disposé leurs maigres étals. Licenciée de la fonction publique, comme 450 000 de ses compatriotes, Terasa propose des articles de plomberie et des babioles. « Au moins, je n’ai de compte à rendre à personne », sourit-elle. Ici, le temps paraît souvent s’être figé, mais la bonne humeur reste au rendez-vous. Pour le plus grand plaisir des visiteurs.

Yves Hardy

 

 Pratique :

-  Y aller. Paris-La Havane avec la Cubana de Aviacion ou Air France

-  Renseignements. Office de tourisme de Cuba : 280 Bd Raspail – Paris 75014. Tél : 01 45 38 90 10

-  Voir aussi www.autenticacuba.com

- Guides : Cartoville La Havane et Encyclopédie du voyage (Gallimard) ; guide Petit Futé et guide Lonely Planet .