La Guyane entre jungle et mer

Voyage au coeur de la France équatoriale, en Guyane, au plus profond de la jungle dans un camp Canopée jusqu’à la côte, un temps “enfer au paradis”, et les marais de Kaw. Une expérience unique signée Nomade Aventure !

En cette belle matinée déjà chaude, la pirogue glisse lentement sur les eaux chocolat du fleuve Kourou, l’une des innombrables rivières qui quadrillent la Guyane Française. A bord de l’embarcation, la douzaine de passagers n’en finit pas d’admirer les rives bordées par la forêt primaire, sorte de mur impénétrable dont on perçoit déjà l’exubérance végétale mêlée à d’innombrables espèces animalesIci, un urubu à tête jaune. Là, un morpho bleu aux ailes bleu métallisé. Plus loin : un oiseau-sentinelle plus connu sous le nom de païpayo. Et partout, le cri des singes, des grenouilles et des rapaces. Bienvenue en Amazonie, véritable poumon vert recouvrant 94% du département, soit près de 8 millions d’hectares…

Après une heure trente de navigation, l’équipée débarque enfin au camp Canopée planté au beau milieu des arbres cathédrales dont l’enchevêtrement des feuillages laissent à peine filtrer la lumière. De part et d’autre, la chaleur humide atteint son paroxysme. Lionel, le propriétaire des lieux, invite alors les visiteurs à prendre leurs quartiers dans le carbet perché à 12 mètres au dessus du sol.

Héritée des amérindiens, l’habitation est réduite au stricte minimum : un toit, un plancher, une balustrade et des crochets pour suspendre les hamacs. Pour une immersion totale… Avant de s’élancer vers la cime des arbres via tyroliennes et équipements d’escalade adaptés au grand public.

Une fois parvenu au sommet d’un colosse de 36 mètres -l’équivalent d’un immeuble de 15 étages- on mesure alors l’immensité de la forêt. Un panorama de toute beauté où s’étire, à perte de vue, le moutonnement inextricable des frondaisons rehaussées d’un étonnant camaïeu de verts. Tel un immense tapis moelleux suspendu sous le ciel bleu… “Plus qu’une aventure insolite, cette expérience est l’occasion de démystifier l’Amazonie et de la rendre accessible à tous”, conclut Lionel, toujours coiffé de son chapeau de cowboy malgré les 32° C ambiant.

De retour à Kourou, les tristement célèbres îles du Salut constituent une escale des plus exotiques. Situées à une quinzaine de kilomètres au large du continent, il ne faut qu’une petite heure pour les rejoindre sur l’un des voiliers qui assurent régulièrement la liaison.

Les flots bruns du littoral guyanais laissent  place alors aux eaux translucides de l’océan atlantique. Tandis que se profilent à l’horizon les trois îlots désormais plantés de cocotiers et de bougainvilliers. Face à cette vision d’éden, difficile d’imaginer que près de 70 000 bagnards -parmi lesquels Alfred Dreyfus, Guillaume Seznec ou Henri Charrière dit Papillon- furent déportés ici jusqu’au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Un épisode dont Royale, Saint-Joseph et l’île du diable conservent encore d’innombrables vestiges laissés à l’abandon et réinvestis par la végétation.

Tout en crapahutant sur les sentiers côtiers, on se laisse peu à peu gagner par la douceur et la sérénité qui sied aujourd’hui à l’endroit. Loin de “l’enfer au paradis” comme le décrivait, à l’époque, le fameux journaliste Albert Londres qui, à force de témoignages et d’articles virulents, encouragea la fermeture des pénitenciers.

A quelques encablures au sud de Cayenne, les marais de Kaw sont, sans conteste, l’un des joyaux du département. Pour s’en assurer, rien de tel qu’une excursion parmi les 130 000 hectares de la réserve naturelle, à l’occasion d’une journée découverte ou d’un week-end organisé sur un carbet flottant. Un monde à part où savanes et marécages dévoilent tour à tour aigrettes, jacanas jaunes, flamants roses, toucan toco et martins-pêcheurs.

Mais c’est à la nuit tombée que les marais offrent leur spectacle le plus fascinant. Lorsque les yeux rouges des caïmans émergent à fleur d’eau et laissent entrevoir les innombrables mystères que réserve encore la Guyane française…

Julie Chevalier