Les trois perles de la Baltique

Sur les bords de la mer Baltique, le visiteur voit de blondes sylphides jusque sur les façades des immeubles ! Tribulations architecturales, en compagnie du guide de Pouchkine tours,  entre la centaine d’églises de Vilnius, la lituanienne, jusqu’à la vieille ville médiévale de Riga (Estonie), en passant par le quartier Art nouveau de Riga, capitale lettone.

À Vilnius, le visiteur a l’embarras du choix : se perdre dans le dédale des églises, dont certaines ressemblent à de gros gâteaux ornés de Chantilly ; déambuler  entre boutiques d’ambre de la Baltique et accueillantes terrasses de café ; ou se laisser glisser vers le quartier branché et un brin déjanté d’Uzupis, lieu de rencontre des artistes, érigé en « République » autonome jumelée avec Montmartre depuis 1998.

Les habitants de Riga vous content une autre histoire, celle de Mikhaël Eisenstein : le père du cinéaste russe, Serguei Eisentein, réalisateur du film « le cuirassé Potemkine », coupa les ponts avec son rejeton lorsque celui-ci s’engagea aux côtés des bolchéviques. Le paternel préféra se consacrer à l’architecture. Les rues du quartier Art nouveau de Riga témoignent de son talent. Et de celui de quelques confrères. Au sein de cette jungle minérale, des femmes au buste dénudé surgissent de sages colonnes ; un couple d’improbables dragons surmonte une porte d’entrée ; quelques baies vitrées aux formes oblongues imposent l’esthétique des lignes courbes ; des cariatides et des atlantes soutiennent une rangée de balcons, tandis qu’au sommet d’un édifice, d’imposants et sévères profils grecs scrutent les visiteurs. Il émane de cette mise en scène théâtrale, de cette profusion d’ornementations à la fois gracieuses et délirantes un charme romantique certain.

Deux autres emblèmes de la ville attirent les regards. Le monument de la liberté, haut de 50 mètres, symbolise l’indépendance lettone de 1918, longtemps remise en cause par les convoitises nazies et staliniennes. Plus inattendu, un chat noir hérissé, posté sur une tourelle, semble prêt à bondir sur les passants. Il évoque en fait un litige d’un siècle passé entre un marchand et sa puissante confrérie, la Grande Guilde.

Plus au nord, Tallinn, la perle estonienne, ville branchée s’il en est, entrée de plain-pied dans l’ère numérique, n’en cultive pas moins avec bonheur son passé médiéval. Les impressionnants remparts, longs de 2,3 kilomètres, enserrent la vieille ville et lui valent le surnom de « Petite Carcassonne ». A l’intérieur de l’enceinte, des ruelles pavées tortueuses conduisent à de jolies demeures hanséatiques et des vestiges des XIVe et XVe siècles, dont une pharmacie datant de 1422. Puis, on se laisse glisser vers la vaste place doucement inclinée de l’Hôtel de ville qui expose ses plaisantes façades pastel. À proximité, les bulbes noirs de la cathédrale orthodoxe Alexandre Nevski semblent pointés vers le ciel. Plus loin, dans le quartier des affaires, une sirène sculptée rappelle que les régates des Jeux olympiques de 1980 se tinrent à Tallinn. Nous nous trouvons face à l’hôtel Viru dont le principal titre de gloire fut d’avoir hébergé, hier, le KGB, au 23e étage, qui officiellement n’existait pas ! Le lieu fait à présent partie des circuits touristiques et l’on montre avec force détail la station d‘écoute sophistiquée chargée d’espionner les visiteurs étrangers, les micros dissimulés partout dans les chambres, des lustres aux tableaux. Chacune des capitales baltes entretient aussi un incontournable musée du KGB. Ils signalent le poids de l’histoire et la force du ressentiment à l’égard de l’ancien tuteur, toujours jugé menaçant.

Yves Hardy

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Guides :

- Estonie – Lettonie – Lituanie – Pays Baltes / Bibliothèque du Voyageur – éditions Gallimard

- Pays Baltes / guide du Petit Futé